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Mohamed Melehi : Disparition d’une icône de l’art moderne marocain

Melehi
Ecrit par Couleurs Maroc

À 84 ans, Mohamed Melehi vient de nous quitter en laissant un patrimoine pictural instimable. Récemment exposé à Londres par la prestigieuse Mosaïc Rooms et à Rabat pour les 60 ans de la CDG; cette figure incontournable de l’avant-garde des années 1960, également fondateur du Festival culturel international d’Asilah; n’avait rien perdu de sa modernité.

Se plonger dans la vie de Mohamed Melehi:

C’est parcourir tout un pan de l’histoire du Maroc. Né en 1936 à Asilah, au sud de Tanger, Mohamed Melehi développe très tôt une fibre artistique. « Dès mon enfance j’ai préféré le dessin aux autres choses; même au jeu ». Après un passage par les Beaux-arts de Tétouan, le jeune Melehi poursuivra sa formation pendant dix ans entre l’Espagne, l’Italie et les États-Unis. C’est peut-être à Madrid, en 1957, que Melehi sort de sa chrysalide. Il y découvre le groupe avant-gardiste El Paso, et plus particulièrement le peintre Manolo Millares. Après avoir découvert ses tableaux en toile de jute, impossible pour lui de retourner à l’atelier de dessin où le nu académique règne en maître.

« Je choisis la réalité expressive de la toile tourmentée et refusai le nu », raconte Melehi.

Telle est sans doute la clef de voûte de l’œuvre de Melehi : le refus radical de la figuration. Contrairement à Millares ou à Alberto Burri dont il découvre les toiles lacérées à Rome où il séjourne de 1957 à 1961. Melehi travaille la toile de jute comme on répare une blessure : il la suture et y appose des signes mystérieux qui rappellent les tatouages berbères. 

Mais c’est réellement à New York qu’il entérine ce qui fera sa signature : les aplats de couleurs pop et l’onde, véritable leitmotiv dans son œuvre. Sa deuxième vie peut commencer. Celle de l’avant-garde qui le consacre, lui, Belkahia, Chebâa et quelques autres, superstars de l’art moderne marocain. De retour d’Amérique, Melehi a une soif de transmission et rejoint Farid Belkahia alors directeur des Beaux-arts de Casablanca où ils entreprennent de révolutionner les arts.

Le « groupe de Casablanca » orchestre un véritable bouillonnement culturel, de l’exposition manifeste place Jamâa el Fna en 1969 à la revue Souffles dont Melehi crée l’identité visuelle iconique. Car le peintre est un touche-à-tout et un antidogmatique. Peut-être est-ce pour cela qu’il fonde en 1978 avec son ami Mohamed Benaissa le Festival culturel international d’Asilah qui; depuis 40 ans, métamorphose cette petite ville en musée à ciel ouvert. Sans doute le plus bel hommage que l’enfant du pays pouvait rendre à sa ville natale.    

Texte Noé Mihaout  

Photos Dr

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Couleurs Maroc

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